Gers : A la Reviscolada le sport comme rééducation et horizon

09 juillet 2024 à 14h37

Après-midi de découverte sportive à la Reviscolada de Montégut. Les patients de ce centre de rééducation fonctionnelle ont pu s'essayer au basket-fauteuil, à la boccia, au laser-run, à l'escrime ou encore au tennis de table en compagnie d'intervenants des différents clubs (Jeunesse Athlétique Pavienne, Cercle Escrime et Pentathlon Moderne Gascon, Cercle Pongiste Auscitain, Auchandi ...) et du Comité Départemental Handisport.

Le cagnard s'abat – une fois n'est pas coutume en ce début d'été timide – sur l'esplanade blanche, neuve, mais pas franchement fleurie de la Reviscolada, et les patients de cet établissement de rééducation fonctionnelle s'aventurent tour à tour dehors, en cherchant la maigre ombre offerte par le bâtiment ou les trois parasols ouverts au-dessus du bitume. Les casquettes sont de sortie, la curiosité aussi, à défaut de grandes envolées d'enthousiasme difficiles à attendre d'un public si sévèrement atteint par les affres de la vie. Ils sont touchés par « des pathologies neurologiques, blessés médullaires accidentés de la route ou de la vie courantes, des gens qui ont des AVC, des blessures de la moëlle épinière en général » explique Pauline, une des infirmières intervenant dans cet établissement situé à Montégut. Tous quasiment se meuvent plus ou moins aisément à l'aide d'un fauteuil roulant, transportant des jambes qui ne veulent plus les transporter ou un côté de leur corps qui a fait sécession. Ils sont parfois jeunes, la majorité tout juste, parfois moins, mais tous sortis de situations qui ont laissé leur corps meurtri. Suffisamment pour que le nombre de patients dehors cet après-midi – une trentaine – soit dépassé par celui des accompagnants – infirmières, aide-soignants, kinés, ergothérapeutes, psychomotriciens, éducateurs sportifs adaptés (APA).

Le sport comme moyen de sortir de l'isolement

Face à eux plusieurs intervenants qui connaissent leurs souffrances et viennent leur apporter le temps de deux heures une échappatoire et un chemin vers la guérison. « J'avais proposé à la direction de la Reviscolada de mettre en exergue l'activité handisport et je suis ravi que ça soit perennisé avec cette journée. En espérant que ça puisse permettre à des gens en situation de handicap parmi nous de pratiquer un sport handisport quel qu'il soit » explique Clément Laffitte, le président du comité handisport du Gers. « La pratique handisport a des valeurs de rééducation. Chacun quel que soit ses difficultés de handicap et de motricité peut s'épanouir dans une activité ». Face au panier de basket, aux cibles du pistolet ou aux boules de boccia, les patients jouent un peu plus qu'une partie de tennis de table. « Il y a une vie avec et après un handicap » indique Mathieu Lange, directeur administratif et financier de la Reviscolada. « Les activités sportives permettent de maintenir des fonctions motrices et cognitives mais aussi une resociabilisation, de recréer un environnement associatif, sportif ».

La rééducation, une quête de performance ?

Clément Laffitte, qui anime la boccia – cette pétanque handisport « pour les plus handicapés d'entre nous, parce que je me mets dans le wagon » – n'en démord pas ; accéder à la pratique sportive dans un premier temps, créer des vocations dans un second. On touche peut-être ici du doigt la différence entre pratique physique et sport, là où le rapport au corps rencontre le rapport à la compétition. Dans une logique de retour aux sensations et, dans la mesure du possible, à l'usage de membres perdus, la quête de résultats et de records est-elle vraiment prioritaire ? « A tout moment dans leur rééducation ils sont dans la recherche de la performance » tranche Xavier, un des kinésithérapeute du centre. « Un patient qui commence à se mettre debout veut toujours marcher. C'est là qu'on essaye de les amener, au maximum de leurs capacités ». Les parallèles existent plus qu'on ne pourrait le croire entre le sport de haut-niveau, sa quête d'excellence permanente, son staff aux allures d'armada, et l'autre extremité du spectre, sa quête de dépassement quotidienne, son « équipe pluridisciplinaire avec des neuropsychologues, ergothérapeutes, ortophonistes. Tous ces maillons de la chaîne qui participent à la progression du patient » détaille Emilie, infirmière.

« Je viens ici pour voir et sait-on jamais ... »

Parfois, les deux mondes se rencontrent. Un des premiers de cordée en cette après-midi estivale s'appelle Roman. Il est jeune, très jeune même par rapport à la majorité des autres patients, et son physique musculeux dénote d'autant plus au sein de l'assistance. Une certaine dose d'ironie entoure sa présence sur cette après-midi sportive, alors que c'est sa propre pratique de l'haltérophilie à haut-niveau – recordman d'Occitanie – qui l'a conduit vers le Gers et Montégut. « Je suis paraplégique parce qu'une barre est tombée sur mon dos et m'a fracturé le lombaire et comprimé la moëlle épinière ». Le ton est calme et posé, assez pour surprendre quant à l'ancienneté du traumatisme : un mois, seulement. Le jeune Montalbanais fait preuve d'un esprit de résilience désarmant, « j'ai vite fait des blagues parce que j'ai compris que ça n'allait servir à rien de s'apitoyer sur son sort et qu'il vallait mieux prendre ça de la bonne manière que de me morfondre. Il me reste quelques années à vivre normalement donc je vais continuer à me donner pour pouvoir remarcher un jour ». Sur la bonne voie dans sa quête de mettre un pied devant l'autre et recommencer – « de ce que j'entends le pronostic est bon » – Roman n'a pas lâché les ambitions compétitives en parallèle. « Ca ne m'a pas du tout dégoûté. Dans le handisport je viens ici pour voir et sait-on jamais avoir une révélation, mais si je dois rester dans le handisport j'ai déjà ma petite idée. Dans mon club à Montauban ils sont équipés en handisport donc pourquoi pas du développé-couché ». Touché, mais pas coulé.

V.M

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