Gers : un an après le titre olympique, Paulin Riva, capitaine des Bleus du rugby à 7, se confie : “Ce sacre a changé nos vies"

C'était il y a un an : l’Equipe de France de rugby à 7 écrivait la plus belle page de son histoire en décrochant sa toute première médaille olympique. Le 27 juillet dernier, dans un Stade de France en ébullition, les Bleus battaient les Fidji pour s’offrir l’or. À la tête de cette équipe championne olympique : le Gersois Paulin Riva. Le capitaine auscitain revient, avec un brin de nostalgie, sur ce moment historique et sur la suite de sa carrière dans un long entretien accordé à la rédaction.

Il y a un an, Paulin, vous remportiez ce titre olympique, marquant l’histoire du rugby français. Un an après, quels souvenirs en gardez-vous ?

"Un an après, c’est encore difficile de mettre des mots sur ce qu’on a vécu. Ce que je retiens surtout, c’est la joie d’avoir partagé un moment aussi unique avec des personnes extraordinaires, que ce soit au sein de l’équipe ou autour de nous. J’ai vraiment pris une claque avec ces Jeux. Je ne m’attendais pas à ce qu’on puisse transmettre autant de bonheur aux gens, aux supporters… Être accueilli comme je l'ai été à Auch et dans le Gers, c’était incroyable. Ces moments de communion ont été très forts. Et quand tu goûtes à ça, t’as forcément envie d’y regoûter. Alors tu te remets au travail, avec l’envie de regagner des titres, et pourquoi pas une nouvelle médaille olympique."

Cela reste le plus beau souvenir de votre carrière ?

"Après avoir vécu l’échec de la non-qualification pour Tokyo en 2021 — où on avait regardé les Jeux Olympiques depuis notre télévision, on avait coché Paris comme un objectif majeur. C’était le moment idéal pour placer le rugby français, et à 7, sous les projecteurs, au plus haut niveau. Il n’y avait rien de plus fort que de devenir champion olympique. On a travaillé dur, on s’est donné les moyens d’y arriver, et on a été récompensés."

On a vu ces derniers jours de nombreuses images et reportages, à la télévision et sur les réseaux sociaux, célébrant le premier anniversaire de ce grand moment de sport que furent les JO de Paris 2024. Est-ce qu’il n’y a pas une forme de nostalgie qui ressort ?

"Si, clairement, comme beaucoup d’athlètes je pense. On a envie d’y retourner. C’était plus que du sport : c’était un moment où tout le monde parlait le même langage, peu importe la discipline. Parfois, c’est même un peu dur de revoir ces images, parce qu’on regrette ce temps-là. Mais en même temps, ça donne envie de reconstruire ces émotions dans le futur."

Ce titre olympique a offert un sacré coup de projecteur au rugby à 7. Un an après, mesurez-vous les retombées ?

"Le regard porté sur la discipline a beaucoup évolué. Beaucoup de Français ont découvert le rugby à 7 grâce aux Jeux Olympiques, et ont été agréablement surpris par la qualité du jeu, la vitesse, l’intensité… sur un terrain aussi grand. On a envie de continuer à montrer tout ça, notamment aux jeunes générations, aux supporters. Et on espère vraiment que cet engouement va perdurer."

Un titre olympique qui a peut-être aussi permis de séduire davantage la jeune génération ?

On sent vraiment une émulation chez les jeunes. Ils ont de plus en plus envie de découvrir le rugby à 7, de goûter à ce rêve olympique, et de faire briller la France. Nous, on essaie de transmettre tout ce qu’on a appris, tout ce qu’on vit au quotidien. Quand on aime le rugby, on ne peut qu’aimer le rugby à 7.  Les jeunes viennent souvent nous poser des questions : où pratiquer, comment ça fonctionne, ce que ça demande... C’est super intéressant. Devenir champion olympique, ça change vraiment la donne. Ça pèse lourd dans la balance. Les Jeux, c’est la plus grande compétition sportive au monde. Et quand tu deviens champion olympique, tu fais briller ton pays, mais tu mets aussi un coup de projecteur incroyable sur ta discipline."

Le rugby à 7 continue de se structurer en France .. 

"Le rugby à 7 en France, cela fait un moment qu’il se développe. Je dirais même que la pratique a explosé ces dernières années. Je tiens à saluer le travail effectué par Christophe Reigt, Manager des équipes de France 7, et Jérôme Daret, notre ancien sélectionneur. Ils ont accompli un énorme travail avec les clubs professionnels du Top 14 et de la Pro D2, en mettant en place une convention pour mieux alimenter l’équipe de France à 7. Depuis cinq ans maintenant, on voit aussi émerger le Supersevens : le championnat de France des clubs professionnels, qui se déroule chaque été. Les clubs du Top 14 s’y affrontent pour décrocher le titre de champion de France à 7. On a vraiment envie que ce championnat continue à grandir : qu’il dure plus longtemps, avec encore plus de tournois, pour faire progresser le niveau du rugby à 7 en France. Et pour aussi mieux alimenter l’équipe de France, pour qu’on puisse s’inscrire durablement dans le Top 3 mondial, chaque année."

L’après-JO a été un peu plus difficile pour l’Équipe de France. Vous êtes peut-être davantage attendus par les autres nations ?

"Oui, on a pu le voir cette année. On termine 5e mondial à Los Angeles. Il a fallu composer avec un effectif remanié à 70 %, un nouvel entraîneur. Mais c’est vrai aussi que les autres équipes nous regardent différemment maintenant. Elles nous analysent de plus en plus finement, cherchent à comprendre comment faire tomber l’Équipe de France. "

Ce titre olympique vous a fait entrer collectivement dans une autre dimension, avec beaucoup plus de sollicitations. Ça n’a pas été trop difficile à gérer ?

"Avant de faire les JO, j’avais regardé pas mal de reportages, où des sportifs disaient : “quand tu deviens champion olympique, ta vie change”. Et effectivement, c’est une réalité. Collectivement, notre vie a changé. Tout s’est accéléré, avec beaucoup plus de sollicitations. Mais on l’a accepté avec plaisir, parce qu’on a envie de transmettre notre passion, de promouvoir notre discipline. Je suis très fier d’être aujourd’hui un ambassadeur français du rugby à 7."

Vous souhaitiez profiter de cette interview pour adresser un message aux Gersois ?

"Oui. J’en ai rarement eu l’occasion, alors je voulais en profiter pour remercier tous les Gersois. Ce que vous m’avez donné en termes de soutien et d’amour, c’est presque trop. Je ne saurais jamais comment vous le rendre. Mais sincèrement : merci. Je me sens chez moi dans le Gers. C’est important pour moi d’habiter à Auch, d’y revenir souvent. Ça m’aide à prendre du recul sur le sport, sur la vie, et c’est ce qui me permet ensuite de performer en Équipe de France."

Savez-vous qu’en plus d’avoir marqué l’histoire du sport français, vous êtes aussi entré dans celle du sport gersois, en devenant le 2e champion olympique natif du Gers ?

"Oui, on me l’a appris quelque temps après le sacre. Je crois que ça remontait un peu, d’ailleurs. C’était peut-être le bon moment pour remettre les pendules à l’heure (rires). Ce que j’aimerais maintenant, c’est voir émerger d’autres champions olympiques venus du Gers."

Vous vous étiez blessé en fin de saison. Comment allez-vous aujourd’hui ? Et quelles sont vos prochaines échéances ?

"Je m’étais arraché un ligament au niveau du pouce du pied. Mais aujourd’hui, ça va beaucoup mieux. J’ai repris l’entraînement de mon côté. On est actuellement en vacances, mais on commence en août la préparation physique individuelle, chacun chez soi. Ensuite, on reprendra collectivement en septembre pour préparer la première étape du circuit mondial, avec notamment un tournoi amical face à plusieurs sélections européennes."

Les Jeux Olympiques de Los Angeles c'est dans trois ans, comptez-vous prolonger le plaisir jusqu'en 2027 avec l'Equipe de France ? 

Barraque à Nice, Demai-Hemecher à Tarbes… Plusieurs joueurs de rugby à 7 vont faire des crochets avec le XV la saison prochaine. Revoir Paulin Riva à Auch ou dans un autre club à XV, c’est envisageable ?

"Sacrée question (rires) Je suis tombé amoureux du rugby à 7. Je me vois mal quitter cette discipline. Mais bon… on ne dit jamais jamais. Alors non, je ne dirais pas que je laisse la porte grande ouverte, mais aujourd’hui je suis pleinement concentré sur le rugby à 7 et sur l’Équipe de France. Par contre, si un jour on monte une équipe de rugby à 7 à Auch… là, clairement, ça me parle énormément. J’envoie d’ailleurs un petit message aux co-présidents, s’ils nous lisent (rires)." 

CP principal : Gers le département

  Des propos recueillis par Enzo Rousseau