L'égalité des droits a encore du chemin à faire dans le Gers

02 octobre 2023 - 16:12

La Défenseure des Droits, Claire Hédon, était dans le Gers jeudi dernier, dans le cadre d'une journée dédiée aux discriminations organisée par l'Agglomération du Grand Auch. 

Le rôle de la Défenseure des Droits (DDD) et de ses équipes recouvre cinq domaines de compétence, au premier lieu desquels la lutte contre les discriminations. L'autorité a aussi la charge de la protection des droits des enfants, de l'orientation des lanceurs d'alerte et fait figure d'organe externe de contrôle de la déontologie des forces de l'ordre. Cinquième domaine, et pas des moindres : les problèmes des usagers de service public. Dans le Gers c'est de loin celui qui occupe le plus du temps de mission, bénévole, des deux déléguées locales de l'organisme. En 2022, 98% des 220 litiges portés devant le DDD avaient trait à des problématiques de paiement de diverses allocations.

« On observe des difficultés d'accès aux services publics dans les zones rurales, liées à des accueils qui ont fermé, et ce malgré l'ouverture des maisons France Service. Les usagers en difficulté avec le service public ont besoin de voir quelqu'un. On parle d'une personne qui est à la retraite depuis un an et qui ne reçoit pas de pension, qui ne reçoit pas son indemnité maladie, son APL. Nos délégués accueillent en présentiel les réclamants et vont faire le lien et jouer le rôle de médiateur avec le service public en question pour régler le problème ». Un trait d'union humain alors que les guichets ferment en masse pour laisser place à des interlocuteurs dématérialisés, dans un département où la fracture numérique n'est pas encore résorbée et un pays où un tiers de la population serait éloignée dudit numérique. Un rôle de facilitateur nécessaire dans une « société qui se crispe ». Pour Claire Hédon, le DDD remplit un rôle essentiel de cohésion sociale, à sa petite échelle, du fait d'une notoriété encore faible auprès des Français.

Au niveau national, 126 000 requêtes ont été formulées en 2022. La Défenseure des Droits prévoit une augmentation cette année, autour des 145 000. Des nombres qui ne « disent pas l'ampleur des discriminations », qui constituent une part limitée des réclamations. Un fait particulièrement vrai dans le Gers. Cependant, « les discriminations sont fréquentes aussi en zone rurale » rappelle la Claire Hédon. Au cours de la journée dans les locaux de Circa, les intervenants ont pu dialoguer dans le cadre de petites saynètes de mise en situation. Quel comportement adopter quant un collègue se comporte de manière raciste, sexiste ou tout simplement aggressive de manière récurrente ? « On ne peut pas tout faire peser sur les victimes » martèle Claire Hédon, qui constate un hiatus entre la liberté « des frontons » et la réalité observée dans la rue. La Défenseure des Droits compte sur ces évènements participatifs pour passer de la devise désincarnée aux consciences, sur le handicap ou l'égalité homme-femme. 

La Préfecture du Gers s'engage avec l'application App'Elles contre les violences faites aux femmes

Le sujet a beau être une « grande cause nationale » du gouvernement, la tendance n'est pas particulièrement reluisante pour les services de l'Etat. Les violences faites aux femmes sont en augmentation dans le Gers sur la première partie de l'année 2023. Si les actes de violences sexuelles sont à l'équilibre par rapport au premier semestre 2022 – de 93 à 90 – c'est particulièrement le cas des violences intra-familiales, avec une hausse de 40% constatée dans le département, essentiellement en zone gendarmerie (hors Auch).

Pour éviter d'avoir à guérir, la Préfecture, en lien avec les associations, professionnels de santé et de sécurité ainsi que les collectivités locales et les services de l'Education Nationale, souhaite promouvoir dans le Gers l'usage de l'application App'Elles. Lancée par une association nantaise et désormais présente dans une vingtaine de pays et sur toutes les plateformes de téléchargement, App'Elles « permet d'avoir un système d'alerte lorsqu'une femme se sent en danger à son domicile ou dans la rue. Elle peut avoir un interlocteur au téléphone qui l'aide dans la situation dans laquelle elle se trouve », précise Laurent Carrié, le Préfet du Gers. L'utilisatrice peut ainsi entrer trois « protecteurs » dans l'application, mis au courant en cas de déclenchement du signal d'alerte, qui démarre aussi un traçage GPS et un enregistrement sonore du portable de la victime. Parmi les autres fonctionnalités un registre de liens (lignes d'aides, plateforme de chat, fiches conseils et premiers secours) et de lieux (centres d'accueil et de prise en charge des victimes). Déjà lancée à l'occasion des principales festivités de l'été, Pentecôtavic et les Bandas, l'application devrait permettre « d'intégrer la notion de respect dans la culture de la fête ».

Encore très peu répandue dans le Gers, App'Elles compte à l'heure actuelle 60 000 utilisateurs, majoritairement en France, pour 28 000 alertes lancées en 2020 (par 8900 utilisatrices), mais reste un outil de prévention et n'a pas vocation à résoudre toutes les problématiques de violences. « Certes l'application est très bien puisqu'elle permet d'apporter une réponse à une situation d'urgence, en tout cas des situations qui démarrent. Mais parfois la problématique est enkystée, la personne n'a plus son téléphone qui a été confisqué par le conjoint, ou n'ose pas faire la démarche. A ce moment là il est important d'avoir des professionnels qui sont capables de détecter les signaux faibles, c'est à dire les comportements qui laissent penser qu'il y a peut-être un cas de violence intra-familiale » indique le Préfet.

V.M

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