Après le rugby, qui avait permis l'exposition Du Coq à l'Âme, les Archives Départementales du Gers lancent une grande collecte autour du sport de manière plus générale. Démarrée lundi avec une semaine « publique », ce recueil de pièces de toutes sortes, qui ont fait la petite ou la grande histoire du sport gersois, va se poursuivre au cours des prochains mois.
Alors, la France pays de sport ? La question, qui revient de temps à autres animer le débat public, devrait peut-être se poser à l'aune de son inscription dans le « champ intellectuel » du pays des Lumières. Même si la mémoire collective a souvenance des hauts faits sportifs, si les mémoires individuelles maintiennent parfois les traces d'un temps révolu, la société elle-même est parfois prompte à jeter un voile sur ce qui a pu l'animer. « Dans les fonds que nous conservons et qui sont aujourd'hui très volumineux, le sport est assez peu présent » reconnaît Pascal Geneste, directeur des Archives Départementale du Gers. Véritable « hippocampe » du cerveau collectif, le service souhaite remédier à ce manque, à travers une grande collecte à destination de tous les Gersois.
« Le sport on le trouve plus dans la sphère privée »
« Nous conservons essentiellement des documents issus de la sphère publique. Le sport on le trouve plus dans la sphère privée, plutôt animé par les associations comme les clubs, ou des personnalités morales ou physiques comme les sportifs eux-mêmes ». Il faut dire aussi que le champ de la mémoire, comme les champs universitaires, a mis du temps à s'emparer de la problématique. Trop prosaïque sans doute. De fait, retracer une histoire du sport dans le Gers s'avère difficile à l'heure actuelle. Les mémoires, éclatées entre les différents acteurs – quand elles ne sont pas tout bonnement supprimées au moment des ménages de printemps des club-houses – s'éparpillent et n'offrent qu'une image parcellaire du fait sportif départemental.
Sans aller jusqu'à l'analyse des tendances sur le temps long, même les évènements les plus marquants n'ont tous comptes faits pas forcément laissé d'empreinte durable à laquelle se raccrocher. Au moment de faire écho à la journée de samedi, en sortant du formol le dernier détour de la flamme olympique dans le Gers à l'occasion des Jeux Olympiques d'Albertville en 1992, les collectivités se sont heurtées à la faible quantité d'archives disponibles. Exhumant à grand peine quelques encarts après des semaines d'interrogation sur le nom des porteurs ou l'affluence totale (5 000 personnes), la ville d'Auch a même retrouvé – par hasard ! – la torche de l'époque, qui s'était éteinte sans gloire dans une armoire.
Tous les sports, tous les formats, toutes les époques.
Face à ce « vide » et après avoir défriché l'ovalie sur plus d'un siècle, les Archives Départementales du Gers ont décidé de lancer une nouvelle grande collecte. « On n'est pas du tout restrictif, c'est une collecte au sens large, de documents papiers ou numériques, iconographiques ou audiovisuels. Si certains ont réalisé dans les années 50' à 80' des films amateurs sur leur caméra Super 8 on est tout à fait prêt à les numériser » invite Pascal Geneste. « On est très ouverts sur les disciplines. On était parti du rugby mais on sait que le football a un nombre de licenciés beaucoup plus important, le basket est très présent, le cyclisme l'a été, peut-être un peu moins aujourd'hui. Les courses de Biran, de Valence-sur-Baïse ou le criterium d'Auch sont très importantes, sans parler du Tour de France passé à plusieurs reprises dans le Gers, à commencer par la première fois en 1951. On a peu de traces de ce passage ».
D'autres disciplines ont aussi vu leur prestige s'étioler, et des clubs installés au niveau national en être réduits à briguer les lauriers départementaux faute de mieux. Qui se souvient par exemple de cette dream team condomoise qui était devenue vice-championne de France du 4x200m et possède toujours le record d'Occitanie (avec Thierry Lauret, sélectionné aux Jeux Olympiques en 1988) ou de l'époque ou les clubs gersois sortaient des gymastes capables de défendre leurs chances aux anneaux sous les anneaux – Laurent Barbiéri de la Municipale Gymnique de Condom en 1984 et Claude Carmona de l'Avant-Garde Auscitaine en 1988 ?
Pour rafraîchir les mémoires, les créer, ou tout simplement écrire avec recul une histoire du sport dans le Gers, la Grande Collecte va prendre son temps. « On a trouvé opportun de faire avant le passage de la flamme une belle opération autour de cette collecte des archives du sport dans le Gers. Bien évidemment les personnes qui ne sont pas sur place ou qui ont besoin d'un peu de temps pour retrouver leurs souvenirs, leur mémoire à travers les documents qu'elles conservent, peuvent nous contacter bien au-delà de cette semaine » explique le directeur des Archives. Avec quelques éléments déjà récoltés - ci-après -, d'autres promis, la fouille dans le passé ne fait que commencer.
V.M